BNP Paribas suspectée de pratiques commerciales trompeuses

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Accusée de pratiques commerciales trompeuses, BNP Paribas a comparu devant le Tribunal correctionnel de Paris lundi 8 février 2016. Sans surprise, cette affaire a connu un écho médiatique important, sans véritable explication juridique. Alors, que reproche-t-on vraiment à la plus grande banque française ?

 

BNP Paribas : une offre trop belle pour être vraie

 

A l’été 2001, BNP Paribas a proposé à ses clients d’alimenter un nouveau fond commun de placement épargne, c’est-à-dire une copropriété de valeurs mobilières directement administrée par la banque pour le compte de ses clients. Sur fond de promesses particulièrement alléchantes, de nombreux clients se sont laissés séduire et ont effectivement souscrit à des parts de ce « fond à formule » Garantie Jet 3.

Régulièrement soulevé par les associations de consommateur, le problème avec ces fonds de placement est qu’ils sont accessibles à tous, même à des clients à faibles revenus ne bénéficiant d’aucune expertise ni d’aide de conseillers spécialisés. En soi, le libre accès à ces produits financiers n’est pas un souci. Cependant, nombre de ces clients ont une confiance aveugle dans les promesses marketing des établissements de crédit. D’ailleurs, cette question resurgit également dans d’autres secteurs dans lesquels les entreprises se concurrencent trop souvent sur le sensationnalisme de leurs publicités plutôt que sur la réalité de leurs services.

Dans le cas de BNP Paribas, la banque offrait à ses clients deux choses :

  1. « la certitude de récupérer, à l’échéance des 10 ans, votre investissement »
  2. « la possibilité de tripler votre capital en 10 ans avec un maximum de sécurité, dans le cadre privilégié de l’assurance-vie »

La banque a clairement pêché par optimisme. Lorsque que ce produit financier a été proposé aux clients, les perspectives financières étaient relativement bonnes. Or, tout a changé à la suite de la crise des subprimes entre 2007 et 2008 et les conséquences de cet épisode continuent encore aujourd’hui à se faire sentir. Cet épisode financier s’est notamment traduit par une chute drastique de la valeur des fonds soumis aux fluctuations du marché, tels que les fonds communs de placement épargne. Bien loin d’atteindre la rentabilité promise, les investissements des clients gérés par BNP Paribas ont brutalement périclité. Le triplement de la somme de départ n’était plus qu’un rêve lointain, mais les clients de BNP Paribas n’étaient pas au bout de leurs surprises.

A l’arrivée, à échéance du terme de dix ans, les clients de BNP Paribas ont pu constater que, non seulement leur capital était bien loin d’avoir fructifié, mais qu’au contraire il avait diminué alors même que ces placements étaient censés être sécurisés : il s’est avéré que la banque avait soustrait des frais de gestion et des frais d’entrée dans les contrats d’assurance vie aux investissements reçus. Malgré les promesses de leur banque, les clients de la BNP ont donc perdu de l’argent.

 

 

Les clients insatisfaits : des lanceurs d’alertes traditionnels

 

Une première plainte émanant d’anciens clients de la banque ont alerté le Procureur de la République, qui a lui-même transmis le dossier à la Direction départementale de la Protection des Populations, couramment appelé la répression des fraudes, un service administratif de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) du ministère de l’économie.

Saisi du dossier, le service de la répression des fraudes a rapidement pu analyser l’offre de la banque comme étant constitutive de pratiques commerciales trompeuses, telles que définies aux articles L.121-1 et suivants du code de la consommation. Cet article qualifie notamment de pratique commerciale trompeuse une communication qui « omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle » ou une situation dans laquelle une société « n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte ».

L’accusation portée contre BNP Paribas est relativement réduite. Ce n’est pas tant un véritable mensonge qu’observe l’administration qu’un manque évident de clarté de la part de la banque, laissant habilement sous-entendre aux clients qu’ils ne risquaient rien mais sans jamais les assurer explicitement qu’ils ne perdraient pas un sou dans l’opération. C’est sur ce point précis que la banque est aujourd’hui poursuivie, à l’exclusion de tout autre.

L’opportunité annoncée de tripler le capital investi par les particuliers n’a pas été perçue comme constitutive de pratiques commerciales trompeuses par le service de répression des fraudes, la publicité de BNP Paribas ne faisant état que d’une « possibilité », même si plusieurs anciens clients se sont constitués partie civile et ont demandé à ce que le triple de leur investissement leur soit versé à titre compensatoire.

A noter : BNP Paribas avait déjà remboursé les frais litigieux ayant diminué le montant des sommes initialement investies « à titre purement commercial », mais cela n’a pas suffi à calmer la colère des clients déçus ni la volonté de l’administration de poursuivre toute manœuvre frauduleuse.

Le délibéré aura lieu le 11 avril 2016, affaire à suivre donc.