Loi Macron : la nouvelle justice prud’homale est arrivée et entre en vigueur le 1er août 2016

Dossiers Prud'Hommes - LMC Avocats

La loi n°2015-990 du 6 août 2015 (dite Loi MACRON) et le décret n°2016-660 du 20 mai 2016 ont réformé de manière profonde la justice prud’homale.

En première instance, la procédure reste orale

Mais attention :

  • Les textes du Code de procédure civile sont applicables (Livre I.art.1 à 749 du CPC), dont ceux sur le principe du contradictoire et la preuve, sauf dispositions spécifiques.
  • Les conclusions doivent être écrites, viser les pièces et détailler un dispositif (le «Par Ces Motifs»). Le dispositif fixe les prétentions.
  • En appel, il s’agit d’une procédure écrite

La procédure est soumise aux dispositions sur la représentation obligatoire.

L’article R.1452-6 du Code du travail, qui édictait le principe de l’unicité de l’instance, est implicitement abrogé par le Décret du 20 mai 2016. Les prétentions respectives des parties sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. En appel, les parties sont tenues par leurs demandes de première instance.

L’objet du litige peut être néanmoins modifié par les demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

 

L’assistance et la représentativité des parties

Les parties se défendent elles-mêmes ou peuvent se faire assister ou représenter.

Les avocats n’ont plus à produire une «lettre d’excuse», la mention «les parties comparaissent en personne» ayant disparue.

Par qui ?

  • Les salariés ou les employeurs appartenant à la même branche d’activité
  • Les défenseurs syndicaux (voir ci-dessous);
  • Le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin
  • Les avocats.
  • L’employeur peut également se faire assister ou représenter par un membre de l’entreprise ou de l’établissement.
  • Le représentant, s’il n’est pas avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. Devant le bureau de conciliation et d’orientation, cet écrit doit l’autoriser à concilier au nom et pour le compte du mandant et à prendre part aux mesures d’orientation.

La loi Macron a créé «le défenseur syndical» (L.1453-4) qui aura des fonctions d’assistance ou de représentation devant le CPH et les CA en matière prud’homale.

Il est inscrit sur une liste arrêtée par l’autorité administrative sur proposition des Organisations Syndicales Représentatives d’employeurs et de salariés au niveau nationale interprofessionnel, national et multi professionnel ou dans au moins une branche.

En appel, les défenseurs syndicaux doivent avoir un pouvoir spécial d’interjeter appel ou de représenter le salarié (ou l’employeur).

Préalablement à la saisine du CPH, le salarié (ou l’employeur s’il est en demande) doit faire connaitre par écrit (LRAR) ses contestations et proposer de régler le litige amiablement. A défaut de respecter cette démarche, la saisine est irrecevable.

 

A compter du 1er aout 2016, la saisine du CPH se fait :

  • Par voie de requête avec :
    • un exposé sommaire des motifs de la demande,
    • les pièces doivent être jointes avec un bordereau en autant d’exemplaires que de défendeurs + 1 exemplaire pour la juridiction.
  • La saisine interrompt la prescription.
  • A défaut de respect de ce formalisme la sanction est la nullité de la saisine
  • La convocation est adressée par le greffe outre les données habituelles (jour, heure, lieu, etc.), elle contient :
    • la requête du demandeur et le bordereau des pièces,
    • une invitation à la partie défenderesse de déposer ou adresser, au greffe, les pièces qu’elle entend produire, et à les adresser à la partie demanderesse.

En cas de licenciement économique, l’employeur doit déposer ou adresser les éléments mentionnés à l’article L.1235-9 du Code du travail + 1 copie au demandeur (documents économiques du Chapitre III en cas de consultation du CE ou DP)

 

L’incompétence de section

A soulever au plus tard devant le BCO (Bureau de conciliation).

Si l’affaire est renvoyée en Bureau de Jugement directement : elle doit être soulevée avant toute défense au fond.

Le Président du CPH, après avis du Vice-président, tranche seul, par une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours.

 

Le Bureau de Conciliation (BCO)

  • Peut entendre chacune des parties séparément et dans la confidentialité.
  • En l’absence de conciliation: le BCO assure la mise en état, fixe la date de BJ, fixe, après avis des parties, les délais et conditions de communication des prétentions, moyens et pièces, peut désigner 1 ou 2 Conseillers rapporteurs
  • Le BCO peut toujours ordonner :
    • la délivrance de certains documents ;
    • la condamnation provisionnelle de certaines sommes ;
    • toute mesure nécessaire à la conservation de preuves ;
  • Le BCO peut aussi (nouveauté) : prendre une décision provisoire sur la délivrance d’une attestation POLE EMPLOI.
  • Le BCO peut homologuer un accord issu d’un mode de résolution amiable.
  • Le BCO peut désigner un médiateur si les parties sont d’accord.
  • Le BCO peut enjoindre les parties de rencontrer un médiateur

 

Absence du demandeur :

a) S’il a un motif légitime : renvoi à un autre BCO

b) S’il n’a pas de motif légitime :

  • Renvoi à un BJ
  • Requête et citation peuvent être déclarées caduques
  • Jugement immédiat si le défendeur le sollicite en fonction des pièces et moyens communiqués contradictoirement.

 

Absence du défendeur :

a) S’il a un motif légitime : renvoi à un autre BCO

b) S’il n’a pas de motif légitime : jugement immédiat possible si les pièces et moyens ont été communiqués contradictoirement. A défaut, renvoi à une audience ultérieure de BJ pour s’assurer la bonne communication des pièces et moyens au défendeur.

Orientation de l’affaire par le BCO :

Sur proposition des conseillers et avec l’accord des parties :

  • Vers une formation restreinte (2 conseillers)
  • Vers une formation avec 4 conseillers et 1 juge départiteur

A défaut, renvoi vers une formation avec 4 Conseillers.

 

Le Bureau de Jugement (BJ)

  • Si absence du demandeur (application de l’article 468 du CPC)
  1. Jugement sur le fond si le défendeur le demande
  2. Citation caduque (faculté pour le demandeur de rapporter la caducité dans les 15 jours si motif légitime). Le délai de 15 jours court à compter de l’audience où il a été absent.

Attention : la caducité n’interrompt pas la prescription.

  • Absence du défendeur :
  1. Absence légitime = renvoi à un autre BJ
  2. Si pas d’absence légitime = jugement sur le fond.

 

La procédure d’appel à compter du 1er aout 2016

L’Appel est formé, instruit et jugé selon la procédure avec représentation obligatoire.

  • Délais et formalisme plus stricts pour signifier :
  • Les déclarations d’appel
  • Les conclusions :
    • 3 mois pour l’appelant à compter de la déclaration d’appel;
    • 2 mois pour l’intimé à compter de la signification des conclusions de l’appelant pour conclure et former le cas échéant l’appel incident.
  • Les pièces : l’ensemble des pièces de première instance doivent être communiquées
  • Sanction en cas de non-respect des délais : caducité de la déclaration d’appel, irrecevabilité des conclusions de l’intimé.
  • Obligation pour les avocats de transmettre les actes de procédure par la voie électronique.
  • ATTENTION : la Cour ne statuera que sur les prétentions du dispositif (954CPC) et des dernières conclusions.
  • Pour les défenseurs syndicaux, obligation de respecter les délais de la procédure avec représentation obligatoire et doivent avoir un pouvoir spécial.
  • La procédure d’appel n’est pas soumise aux droits d’un timbre fiscal à hauteur de 225€ (circulaire du 5/07/16).

 

En conclusion

  • Le BCO doit être abordé tout à fait différemment : le dossier doit être prêt avec les pièces en demande et en défense ce qui signifie que, par exemple en cas de licenciement, les éléments justificatifs doivent exister au moment de la décision de licencier et les éléments de contestation doivent aussi exister à la saisine du Conseil. Les pièces doivent être communiquées dès le stade du BCO.
  • Il est indispensable d’être présent à l’audience de BCO : à défaut, l’employeur risque qu’un jugement soit rendu à son encontre sur les seules pièces du salarié et si le salarié est absent il risque de voir une caducité prononcée contre lui.
  • La procédure devant la Cour d’Appel est désormais écrite et stricte avec une représentation obligatoire par un Avocat ou par un défenseur syndical. Les délais sont des délais couperets irréversibles.