Agression par un mineur, la responsabilité civile du mineur est-elle engagée ?

responsabilité civiles des mineurs

La Cour de cassation est venue rappeler le 20 octobre 2016 (pourvoi n°15-25.465) le principe depuis longtemps acquis selon lequel la minorité de l’auteur d’un fait ayant causé un dommage n’empêche pas d’engager sa responsabilité.

Il convient de revenir sur les faits ayant donné lieu à l’intervention de la Cour de cassation pour comprendre la portée de cette solution.

 

L’agression d’une assistante familiale par un enfant : retour sur la responsabilité civile des mineurs

 

Une assistante familiale avait été agressée par un mineur dont elle s’était vu confier la garde par une association, avec qui elle était liée par un contrat d’accueil permanent.

L’assureur de l’association l’avait indemnisé pour les dommages matériels.

L’assistante familiale avait par la suite introduit une demande devant le juge des référés aux fins que soit ordonnée une expertise médicale en vue d’évaluer son préjudice corporel. Cette demande était faite sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile, qui pour rappel précise :

« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».

Sa demande avait été rejetée pour défaut de motif légitime, condition requise par l’article précité.

Les motifs du refus d’expertise étaient les suivants : l’expertise médicale constituait un moyen de se ménager la preuve de son préjudice en vue d’une autre action en responsabilité délictuelle. Or, le juge avait estimé que cette action au fond future ne pourrait aboutir, l’assistante familiale ne pouvant agir contre le mineur, auteur du dommage. Elle ne pourrait de ce fait agir que contre l’association, responsable civilement de l’enfant au moment des faits, avec qui elle entretenait une relation de travail. Or, en raison de cette relation de travail, l’assistante familiale avait déjà perçu une prise en charge au titre de la législation sur les accidents professionnels, et ne pouvait par conséquent obtenir une indemnisation supplémentaire.

Le match étant selon lui joué d’avance, le juge avait estimé l’expertise inutile et n’avait pas fait droit à la demande d’expertise.

 

La minorité d’un auteur de dommage n’exclut par sa responsabilité

 

Cette décision ne pouvait qu’encourir la censure. La Cour de cassation a rappelé dans un arrêt lapidaire que : « la minorité de l’auteur du dommage n’exclut pas sa responsabilité et ne fait pas obstacle à sa condamnation personnelle sur le fondement de l’article 1382, devenu 1240, du Code civil ».

La Cour de cassation se contente en réalité de rappeler un principe acquis depuis un arrêt d’assemblée plénière du 9 mai 1984 (AP 9 mai 1984, n°80-93.031) selon lequel la minorité n’empêche pas de rechercher la responsabilité délictuelle de l’auteur d’un dommage et ce même en l’absence de discernement.

Cette solution rejoint l’évolution plus globale du droit de la responsabilité délictuelle, qui tend à une objectivisation de la faute, peu important la conscience ou non de l’auteur du dommage, en vue d’une plus grande indemnisation des victimes. Cette évolution a notamment été permise par la généralisation de l’assurance.