Un rétablissement de l’équilibre contractuel en matière de baux commerciaux

Baux commerciaux : définition de la clause d'indexation

Définition de la clause d’indexation des baux commerciaux

La clause d’indexation relative à un bail commercial, dite clause « d’échelle mobile », détermine le montant du loyer en vigueur en fonction d’une norme référentielle préétablie.

Le sort de telles clauses est réglé notamment par l’article L.145-39 :

« En outre, et par dérogation à l’article L. 145-38, si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire. La variation de loyer qui découle de cette révision ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente. »

Légalement, la variation du loyer est donc susceptible de se faire à la hausse ou à la baisse selon les changements que connaît l’indice de référence.

Un détournement courant en faveur des bailleurs

Bien que ce mode d’établissement du loyer réponde à un objectif louable, prendre en compte l’évolution du contexte économique afin de permettre un ajustement adéquat du prix du loyer, force est de constater que ce mécanisme avait été quelque peu détourné de sa fonction, plus particulièrement en matière de baux commerciaux.

En effet, alors même que les parties aux baux commerciaux intègrent régulièrement de telles clauses au sein de leurs contrats, la variation du loyer concrètement applicable dans les contrats ne concerne généralement que des mouvements en faveur du bailleur. Le bail commercial prévoit alors que l’évolution du prix du loyer résultant de la variation de l’indice de référence ne peut qu’aller dans le sens d’une augmentation. Autrement dit, même en cas de chute de l’indice choisit, le loyer restera inchangé.

De fait, la possibilité de révision du loyer d’un bail commercial à la baisse est couramment écartée par les stipulations du contrat. Parfois justifiée par le risque d’une baisse drastique et inattendue de l’indice en cause, cette inégalité a plusieurs fois fait l’objet de litiges portés devant les juridictions du fond, sans toutefois qu’un principe clair se dégage.

Bail commercial : définition de la clause d'indexation

Le coup d’arrêt de la Cour de cassation à la seule révision à la hausse du loyer

Or, par un arrêt récent en date du 14 janvier 2016, la Cour de cassation a donné un coup d’arrêt à cette pratique pourtant devenue habituelle.

En considérant que la clause excluant, « en cas de baisse de l’indice, l’ajustement du loyer prévu pour chaque période annuelle en fonction de la variation de l’indice publié dans le même temps » est entachée de nullité et doit être réputé non écrite, la juridiction suprême a tenu à sonner le glas des clauses unilatérales.

Par cette décision, la Cour de cassation a confirmé l’interprétation de la Cour d’appel de Paris qui, selon elle, « a exactement retenu que le propre d’une clause d’échelle mobile était de faire varier à la hausse et à la baisse et que la clause figurant au bail, écartant toute réciprocité de variation, faussait le jeu normal de l’indexation ».

Si la sanction retenue par la Cour de cassation, la nullité, peut paraître sévère et déroger au principe général de la liberté contractuelle, il apparaît nécessaire de rappeler ici que la Cour de cassation se livre ici à un exercice difficile : concilier la volonté des parties et les exigences légales de protection minimale.

En l’espèce, la décision de la Cour de cassation ne favorise le preneur que dans l’optique de ne pas voir bouleverser l’équilibre du bail commercial. L’esprit général de cet arrêt est bien plus d’assurer aux deux parties au bail commercial les mêmes droits et obligations que de pénaliser les bailleurs.

Une alimentation prochaine d’un contentieux complexe

Cet arrêt doit être salué, car il rétablit un équilibre trop souvent perturbé dans le jeu des relations établies en matière de baux commerciaux, aussi bien du côté des bailleurs que de celui des preneurs.

Ainsi, la Haute juridiction ouvre la voie à de potentielles actions en révision du montant des loyers, ce qui implique sans doute le développement prochain de nouveaux contentieux opposant bailleurs et preneurs.

Dans la résolution de ces litiges, la complexité de la législation en vigueur ne doit pas décourager les parties en présence, autant bailleurs que preneurs, à faire valoir leurs droits, si nécessaire au moyen de l’assistance d’un avocat.