L’EXCEPTION D’INEXECUTION DANS LE CONTRAT DE TRAVAIL

Un arrêt de la Cour d’appel de VERSAILLES rappelle qu’un salarié peut refuser d’exécuter l’une de ses obligations essentielles, celle de travailler, tant que son employeur n’a pas respecté l’une des siennes, à savoir de le rémunérer. Si le reproche du salarié est fondé, ce que le Juge appréciera, l’employeur ne peut le licencier pour faute grave, puisque son absence, certes non autorisée, est justifiée.

Dans cette affaire, la société, exerçant dans les activités de la Convention Collective de la prévention et de la sécurité, assistait ses salariés dans leur procédure de renouvellement de carte professionnelle auprès du CNAPS. Elle procédait par envois groupés.

Seulement, alors qu’elle avait expressément pris l’engagement de réaliser les formalités, à travers une note interne, la société a tardé, avec comme conséquence pour le salarié de se retrouver sans possibilité de travailler.

Après avoir nié toute responsabilité dans la situation, la société a suspendu le contrat de travail jusqu’à ce que le salarié, par ses propres moyens, à savoir une nouvelle demande de carte (et non plus un renouvellement), obtienne à nouveau l’autorisation de travailler. Plusieurs mois s’étaient écoulés.

Attribuant alors à son salarié un nouveau poste, auprès d’une autre société en Région Parisienne, celui-ci a refusé de revenir travailler tant que son employeur ne lui aurait pas réglé ses salaires durant la période de suspension du contrat de travail.

Il a été licencié pour faute grave.

Or, la société s’est vue opposée, à la faute reprochée au salarié, sa propre faute.

Le salarié s’est prévalu d’un arrêt de la Cour de cassation qui a jugé que (Cass. soc., 22 juin 2004, n° 02.42-392) :

« Mais attendu que lorsqu’un salarié qui refuse de reprendre le travail en raison de faits qu’il reproche à l’employeur est licencié pour faute grave, il appartient au juge d’apprécier la réalité et la gravité de la faute reprochée au salarié ; »

De même, le 23 juin 2009 (n° 07-44.844) :

« Le refus par un salarié de reprendre le travail peut être légitimé par un manquement de l’employeur à ses obligations ».

Après avoir décidé que la mise à pied disciplinaire infligée au salarié était injustifiée, une Cour d’appel peut en déduire que n’était pas fautif le refus du salarié de reprendre le travail tant qu’il ne serait pas payé de ses salaires dont il avait été privé durant la mise à pied.

Elle a en conséquence jugé à bon droit que le licenciement du salarié suite à ce refus était sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié se posait sur le même terrain et la Cour lui a donné raison, considérant dans un premier temps que la société avait manqué à l’obligation qu’elle avait pris d’assumer la procédure de renouvellement de renouvellement de carte.

« Cependant, dès lors qu’il est établi que la société … était responsable de la suspension du contrat de travail et du non-versement des salaires pendant cette période et que l’employeur n’avait pas répondu favorablement à sa demande de paiement de salaire, M. … était bien fondé à soutenir que le manquement de l’employeur était d’une gravité telle que son refus d’accepter sa mutation n’était pas fautif et son absence à la visite médicale excusable ».

En conclusion, attention à bien remonter la chaîne des responsabilités.